samedi 2 avril 2011

Retour à la ville.

La ville, c'est le mouvement, le bruit, l'activité permanente, un tumulte incessant qui oppresse. La ville va trop vite, elle est un halo de lumière en mouvement, une lumière tourbillonnante. La ville, c'est ce qui effraie Antonioni. C'est Milan qui écrase Monica Vitti. C'est la débauche de la nuit qui perd Jeanne Moreau. La ville, c'est la fin de la communication et le début de l'incommunicabilité. A cause de la vitesse et de l'absence totale de repos. Gigantisme obscur, mais avant tout fascinant.

Les villes se transforment sans arrêt, elle vit aux sons des travaux et des marteaux-piqueurs, des bruits des grues et de la pluie qui bat le pavé entre les sons diffus des boîtes de nuit. La ville n'inspire que rejet et dégoût. Et pourtant elle obsède. La nuit, elle devient autre. Les rues prennent d'autres formes, elle devient un labyrinthe où il fait bon se perdre, seul, à déambuler bêtement. C'est dans ses instants que la ville est belle, que sa taille inhumaine devient agréable. Quand les lumières des voitures flashent et les lampadaires tentent vainement d'éclairer le noir perturbé par les lueurs aux fenêtres d'appartement encore éveillés, on se convainc inutilement que la ville est magnifique parce qu'elle est un rêve éveillé.

Burial, profondément ancré dans la ville, claque ses sons comme une goutte de pluie sur un trottoir, les ambiances ont la profondeur du noir d'une rue désaffectée où seulement quelques aventuriers oseraient s'y rendre. Il y a dans chacun de ses sons la peur urbaine de se faire suivre après une soirée trop arrosée. Il y a chaque crissement de pneu terrifiant, il y a aussi la beauté sombre de l'inconnu et de l'errance. Errer, c'est magnifier le rien de nos déplacements, tenter pour un instant de rendre l'environnement urbain attrayant, diviniser la routine et le quotidien. Burial magnifie l'errance et la ville, il écrit la bande son de la plus belle des ballades au plus profond de la ville. Cette ville là n'est en aucun cas réelle, elle est idéalisée, à la fois repoussante et fascinante, elle est le New York de Céline ou la bourgade paumée du nord de l'Angleterre, elle est le Paris rêvé et le Melun qu'on cherche à fuir. Parce que la nuit, toutes les villes sont les mêmes, noires et lumineuses, Burial leur donne simplement l'âme qu'elles n'ont pas.

Sur Hyperdub, Burial revient comme le messie avec trois titres captivants où la froideur de la nuit s'efface pour qu'une cité déserte et inconnue devienne une ville où l'on aimerait se perdre.

2 commentaires:

  1. Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.

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  2. Dès que j'ai lu le titre, j'ai su que tu citerais Antonioni, tu deviens prévisible.

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