samedi 17 avril 2010

Don't Look Back.

J'aime beaucoup Todd Haynes. Son hommage à Douglas Sirk dans Far From Heaven reste une œuvre majeure des années 2000 en cinéma. En tant que Dylanien pratiquant, apprenant que Todd Haynes sortait un film dédié au chanteur, et non un biopic, j'y ai été un peu les yeux fermés. Impressions mitigées. Parce que c'était long. Que beaucoup de parties étaient incohérentes, fouillies, inutiles. Décrire Dylan comme un vieil ermite errant avec son chien, ça reste assez moyen, à côté des scènes où Cate Blanchett scintille.
La filmographie qui entoure Dylan est conséquente. Bien sûr, il y a le film de Scorcese, No Direction Home et sa forme de documentaire. Mais le meilleur reste le Don't Look Back de Pennebaker, qui accompagne Dylan pendant la tournée de 1965 et invente déjà l'émission Striptease. Dylan oublie la caméra, oublie de jouer son rôle. Des scènes somptueuses y sont, l'assassinat du pauvre Donovan, et Joan Baez chantant "Percy's Song" pendant que Dylan, les yeux dans le vide, écrit quelque chose à la machine à écrire.

Tout ça pour dire que s'attaquer à Dylan est casse-gueule. Que ce soit le mettre au cinéma ou en faire une reprise. Ma haine pour les Guns'n'Roses vient de l'infamie "Knockin' On Heaven's Door" (bien que l'on m'ait fait remarqué que c'était rassurant, finalement : les Guns'n'Roses ne savent même pas jouer de bonnes chansons). Exercice plus que périlleux donc. Cat Power avait réussi sur The Cover Record à reprendre "Paths of Victory", elle s'éclate les dents sur "Stuck inside a mobile with the Memphis Blues Again", dans la lignée de ses derniers disques, hélas. Eddie Vedder s'en sort plutôt pas trop mal, bien qu'il la joue plus Hendrix que Dylan sur "All Along the Watchtower".
Il y a ceux qui se ratent lamentablement, essayant de la jouer tragique : Calexico & Charlotte Gainsbourg sur "Just Like a Woman", Jack Johnson sur "Mama, You Been On My Mind", Bob Forrest sur le standard "Moonshiner"...
Il y a ceux qui ne servent à rien : Cat Power, Jeff Tweedy, Mason Jennings (qui s'attaquent à deux des plus grandes chansons de Dylan pour faire du sous-Bob Dylan), Roger McGuinn et Calexico (encore eux)... Faire du Dylan comme du Dylan, c'est en plus d'être inutile, impossible. Et le problème, c'est que beaucoup font ça. Du coup, ça n'a pas de goût.
Il y a ceux qui reprennent les moins bonnes chansons de Dylan histoire d'éviter le massacre.
C'est quoi ce délire de reprendre des chansons de Saved ? Alors qu'il fourmille des chef-d'œuvres partout ailleurs. Le mec doit pas assumer, il se fait appeler John Doe d'ailleurs.

Et puis il y a les vieux fusils. Ceux qui s'en sortent haut-la-main. Et, étonnamment, on retrouve trois groupes majeurs de la scène alternative : Yo La Tengo, Stephen Malkmus et Sonic Youth.
Stephen Malkmus redonne une jeunesse tout en gardant la puissance originelle de "Ballad of a Thin Man", Yo La Tengo donne à "Fourth Time Around" un charme qu'on ne lui connaissait pas, et requinque "I Wanna Be Your Lover". Et puis Sonic Youth est proche de surpasser le maître avec son "I'm Not There". On savait qu'ils étaient bons pour les reprises ("Superstar" des Carpenters en impose pas mal), mais en touchant à Dylan, Thurston et ses potes se surpassent et sauvent le disque, quasiment. "I'm Not There" qui n'était qu'une chute des Basement Tapes devient une chanson de Sonic Youth à la "Kotton Krown", à la fois terrifiante et hypnotisante.
Finalement, la bande son est à l'image du film : longue et inégale, mais avec ses moments de grâce.

C'était en 2007 chez Columbia Records et ça se télécharge en deux fois.
Disque 1.
Disque 2.

2 commentaires:

  1. Non non non, I'm not there n'était pas qu'une chute des Basement tapes, c'en est un des plus beaux moments. Cette chanson est une merveille (enfin de mon point de vue). Où l'on se rejoint c'est qu'effectivement Sonic Youth en fait une superbe interprétation.

    Dans le film, le passage avec Cahrlotte Gainsbourg où l'on entend le début de Simple twist of fate ("They sat together in the park...") est absolument superbe.

    Sur le DVD il y a la version commentée par Todd Haynes, décodant tous les symboles et références aux chansons de Dylan glissés à foison dans le film et ça vaut vraiment le coup et donne un degré supplémentaire au film (et permet de vérifier si l'on a tout bien décodé).

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  2. J'ai écrit "chute" ? Au temps pour moi alors. Je vais bien sûr dans ton sens. Le sommet des "Basement Tapes", mais chute dans le sens où elle n'est pas sur le disque officiel. Je l'ai sur "A tree with roots" et ses quatre disques moi.

    Les parties avec Charlotte Gainsbourg et Cate Blanchett sont superbes oui. Et quand le gosse chante "When the Ship Comes In" aussi.
    Faudrait que je trouve cette version commentée.

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