mercredi 14 avril 2010

L'empire conte-attaque.

Il faut souffrir pour ensuite savourer en musique. Plusieurs exemples me viennent en tête. Pour prendre en pleine tronche le concert d'Eiffel hier, j'ai dû subir Da Silva et ses rimes foireuses au possible sur mélodies sirupeuses ("mes troubles en eaux troubles", "la est vie terrible mais les journées sont si belles" et autres horreurs). Ce matin, je me suis coltiné en entier l'écoute du nouveau Broken Social Scene. A part le premier morceau, c'est chiant à mourir. Mais je remercie quand même Broken Social Scene, car grâce à ça, je savoure pleinement la discographie d'Alec Empire.

La German Touch. Alec Empire ressemble à une version teutonne de Trent Reznor. Il a fait la première partie de NIN d'ailleurs. Alec Empire a fondé Atari Teenage Riot. Déjà, avec un nom tel, ça peut que être bien. L'Atari, c'est la console ultra vintage. "Teenage Riot" c'est la meilleure chanson du monde. C'est Sonic Youth, c'est normal. Avec son groupe, il a inventé le digital hardcore. Un truc rapide, sauvage et mécanique. Avec des boucles de brute.
Atari Teenage Riot s'est, en plus, reformé et passera à Tourcoing. Il a écrit : "preparing Atari Teenage Riot live set. feels special to load original samples from 1992. this stuff doesn't age, zeroes and ones.still LOUD". Autrement dit, on va faire fumer les tympans.
Alec Empire a aussi une carrière solo géniale.

Atari Teenage Riot - 60 Second Wipeout (1999)

Une pochette digne d'un Street Fighter. Ca donne envie de se battre en fait. Une sorte de musique épileptique complètement sauvage et sans concession. L'album canonique de digital hardcore, avec le morceau canonique de digital hardcore : "Revolution Action". Une musique d'émeute. Les voix sont compressés et saturées. On reconnaît parfaitement la voix de M. Empire, trafiquée comme il le fera toute sa vie. Mais une nana, Hanin Elias qui n'a pas à faire la modeste au niveau des hurlements. Des coups de cymbales à toute vitesse qui peuvent faire rougir Aphex Twin. Pas un morceau n'a un tempo inférieur à 220 je pense. Le Digital Hardcore mélange la techno, un gros boum boum continuel avec le hardcore. Imagine Minor Threat mélangé avec les vieux brulots technos. C'est sauvage, c'est allemand.

Alec Empire - Intelligence & Sacrifice (2002)

On pourrait vraiment croire avoir à faire à Trent Reznor avec cette pochette. C'est pourtant Alec Empire. Mais la similitude ne s'arrête pas à la tronche des deux gars. Parce qu'Alec Empire ralentit un peu le tempo et balance de l'indus. C'est plus malsain, plus lent. Il y a plus de machine. Le culte "Path of Destruction" est un déchaînement de violence après une intro gentillette à l'orgue. On trouve quand même des purs morceaux digital hardcore, peut-être moins "simplet" que ceux d'Atari Teenage Riot. En fait, en deux disques, Alec Empire fait tout ce qu'il aime : il exorcise sa violence sur le premier. Et il canalise sa rage et fait du bruit numérique, pas si loin d'une IDM bien abstraite, sur le second. Et surtout, le premier morceau du second disque, au doux nom de "2641998" est une tuerie noise/indus de 30 minutes. Un truc à la Merzbow à écouter au casque.
Pas étonnant d'ailleurs qu'il ait bossé avec Masami Akita, aka Merzbow. C'est un live au CBGC en plus.
Dans la plus pure veine digital hardcore, avec un poil plus de guitare, et moins sauvage, il a sorti Futurist en 2005. C'est presque devenu du punk mais "Kiss of Death" soulage quand même.

Alec Empire - The Golden Foretaste of Heaven (2008)

Avec tout ça, on croirait qu'Alec Empire n'est qu'une brute pleine de testostérone qui ne sait que faire du bruit. En même temps, c'est ce qu'on cherche quand on colle un album d'Atari Teenage Riot ou d'Alec Empire dans la platine. En 2008, je téléchargeais ma tournée annuelle de rage. Et là... C'était un peu "qu'est-ce qui lui est arrivé ?". Comme si il était amoureux, qu'il avait eu un gosse ou pris un coup de vieux... Où est la colère qui rugit ? Il a gardé sa voix trafiquée mais la dépose maintenant sur une musique électronique complexe et entraînante. "New Man" est une des meilleures chansons de 2008. C'est étrangement calme et posé. On est bien loin du digital hardcore du début. Des grosses nappes électroniques. De l'electro facile et rock avec une voix. Bien sûr, il maîtrise toujours aussi bien le beat. L'album interloque la première fois, mais s'impose très vite. Et c'est un des trois meilleurs albums de 2008 (avec The Walkmen en tête, et je sais plus qui en deuxième). Il y a même des chansons tristes, qui prouvent qu'Alec Empire est un musicien talentueux autant qu'un sauvage anarchiste qui ne fait qu'hurler dans un micro.

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