
Et c'est tout à fait paradoxal. D'un côté, les macarons et les fastes dîners de la Reine. De l'autre, un peuple qui crève de faim. Le cœur balance et finalement, choisit le côté de la Reine. Parce qu'elle est jolie, parce qu'elle est pleine de malice, qu'elle lit Rousseau et qu'elle aime l'opéra. Et si nous, peuple français, démocrates convaincus pour qui la Révolution Française est la plus belle des libérations, à qui la Troisième République a inculqué tant de belles valeurs et une foi inébranlable en la liberté et l'égalité - surtout l'égalité - on se fait avoir, c'est bien que Sofia Coppola sait s'y prendre. Et Aphex Twin est une des raisons.
Aphex Twin fabrique l'ambiance du film. Il fait le paradoxe : une fête baroque sur un titre presque breakcore. Des dorures partout, pour une musique profondément sombre et angoissée. Marie-Antoinette et sa choucroute face à des frappes de cymbales à toute vitesse. L'anachronisme est extrême, le rendu est une réussite : Marie-Antoinette était en avance sur son temps. Elle n'était pas à la bonne place. Tout son ennui, toutes ses angoisses s'expriment par la musique de Richard D. James. Elle monte les interminables marches de Versailles sur "Avril 14th". C'est d'une effroyable beauté. Les robes traînent sur les marches, se salissent. C'est le début de la fin, et l'expression du plus terrible des conflits.
Le tableau se noircit peu à peu. Les couleurs vives laissent peu à peu leur place à l'obscurité, à des tons pastels, puis à des images ternes. Versailles était un paradis, c'est devenu une prison. Et ce disque, derrière les sons abstraits, dessinent quelques mélodies sibyllines, presque baroques. C'est l'itinéraire d'une Marie-Antoinette : une grande confusion, un grand vide, qui peu à peu, s'emplit, avant de fuir et de faire ses adieux. Il n'en restera que des ruines.
Aphex Twin sort Drukqs en 2001, chez Warp, bien entendu. Et c'est comme la Marie-Antoinette de Coppola : noble, complexe, malicieux et terriblement touchant.
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