mercredi 15 décembre 2010

Ossessione.

Le Guépard ressort en version neuve, bobine neuve, avec une Claudia Cardinale rayonnante et un Alain Delon fascinant, aux dents longues et à la chevelure toujours bien mise, et surtout d'une beauté effarante. Le Guépard, c'est un peu Barry Lyndon mais encore mieux. Plus grand, plus beau, plus fou, moins sarcastique surtout. Luchino Visconti n'est pas quelqu'un de très original ni de très créatif en fait. Il ne fait qu'adapter. Il prend des livres de premier plan (le Mort à Venise de Thomas Mann, Dostoïevski, Camus ou Lampedusa, rien que ça) et en fait des films. Toute la force de Visconti est donc dans la forme, dans sa façon d'écrire les images, de faire les dialogues et d'orchestrer ses fresques monumentales en costume. Sans oublier la divine ironie qu'il glisse en plus. Visconti fait bien plus que de simples mélodrames un peu niais, il réinvente le mélodrame comme Douglas Sirk, y ajoute un recul assez noir et désabusé. Comme Dostoïevski en somme, cacher ce qu'il veut montrer par des intrigues et des histoires vieilles comme Jesus.

Et l'air de rien, Visconti a inventé le néoréalisme. Il a ouvert la voie pour Rossellini et De Sica, De Santis et les premiers Pasolini et Antonioni. Il a montré l'Italie comme elle est, avec le regard nouveau de cette vague de cinéastes. Et la suite est belle. C'est même peut-être le sommet du cinéma. En faisant du neuf avec du vieux, en changeant simplement de point de vue, tout a été une révolution.

Reconstruire sur des bases poussiéreuses, c'est un peu ce que James Holden a fait avec Border Community. Dépoussiérer la musique électronique, permettre aux gens de danser sur du neuf en lançant Nathan Fake notamment. Et cette musique est comme le premier film de Visconti, c'est de l'obsession. Tout est basé sur le doute et l'attente, la répétition ininterrompue de beats et des mélodies qui se forment peu à peu, avant de se défaire tout aussi lentement. Au moment où les titres deviennent prévisibles, un détail change. Et ainsi, Holden a ouvert la voie. Et on se retrouve aujourd'hui avec ce Holkham Drones de Luke Abbott, un petit anglais qui prolonge encore l'héritage électronique de son label. Moins efficace que Nathan Fake, plus en tension et dans l'attente, une attente assez vaine, aucune explosion, juste des montées tranquilles vers des pics insoupçonnés. Pas de tape-à-l'œil, pas de costumes, du néoréalisme électronique.

Chez Border Community, en 2010, Luke Abbott ne révolutionnera rien avec son Holkham Drones, il se contentera de faire comme Visconti, du sobre grandiose.

4 commentaires:

  1. C'est dans le tuyau après l'avoir vu chez GT. Déjà probablement un avis demain!

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  2. Bon je suis sensé ne pas laisser de commentaires parce que je suis en vacances, itou... mais bon cet article poutre sacrément :) Et oui le disque est excellent.

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  3. Le Luke Abbott fut un des rares albums stimulants en cette année 2010.

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  4. en electro "pure et dure" je précise !

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