vendredi 24 juin 2011

L'insoutenable légereté de l'être.


Dan Boeckner et Alexei Perry sont de joyeux trentenaires. Ils sont ces gamins des 80s, trop jeunes pour avoir pleurer sur les Smiths et déprimer sur Joy Division. Du coup, ils ont été élevé au son des nineties, avec une amertume au fond de la bouche, ne jamais avoir vécu les danses synthétiques en temps réel, ne jamais avoir fait de soirée indus dans des hangars, ne jamais secouer leurs corps sur des rythmes épileptiques. Dan Boeckner et Alexei Perry ont, ancrée en eux, la mélancolie du kitsch.

Et si l'on cherche les racines de ce terme allemand, on trouve par exemple une citation du tchèque Milan Kundera : "Le kitsch, c'est la négation absolue de la merde". Être kitsch, c'est être tellement daté qu'on ose plus vous regarder. C'est porter une veste en mouton retourné, c'est pleurer les paillettes et s'extasier devant un tapis en forme de tigre. Chacun a son kitsch, chacun y fait son marché, chacun détaille ce qui est tellement "à oublier" qu'il en devient dérangeant. La "merde" devient alors provocatrice, elle explose les standards parce qu'elle s'assume. C'est la toute la force du kitsch, transformer les plus laids des complexes en force destructrice.

Handsome Furs en avait des complexes, sur Face Control. Album indie d'excellente facture, où Wolf Parade s'immisce souvent. Une musique bien sérieuse, avec les sourcils froncés et Boeckner qui se bat pour réprimer ses instincts eighties. Il se bat pour réfréner ses envies de synthés. Handsome Furs complexait sur son grand amour du kitsch. Handsome Furs préférait se cacher, rester dans l'ombre de l'indie à guitare pour que personne ne voit ce nez trop grand, ces poils mal placés ou même ces fesses trop grosses pour les bouger réellement sans se sentir mal à l'aise.

Et deux ans après, comme s'ils avaient terminé leur crise d'adolescence, les deux enfants d'Handsome Furs font tomber les voiles. Ils se montrent nus, à poil, avec tous leurs défauts devant. Ils assument enfin leur amour des synthés ridicules, de la pop mélancolique trop romantique. Ils assument enfin de s'appeler "les fourrures magnifiques", et font leur musique en conséquence. Une musique qui à toute la force du kitsch. Il y a un côté Xiu Xiu dans cette fougue 80s, les expérimentations mises à part. Et finalement, c'est toute la force de la pop qui explose : une naïveté enfantine et dansante pour faire de l'ombre à un côté sombre.

Handsome Furs met en avant ce qu'il essayait de cacher auparavant sur ce Sound Kapital qui sortira le 28 juin chez Sub Pop. Ou quand l'amertume devient pétillante.

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