La semaine dernière, avant de faire mes bagages, j'organisais mon vol. Pour un vol réussi, il faut céder à tous les clichés. On est dans le ciel, au-dessus des nuages. Même avec l'habitude, ce lit cotonneux reste beau à mourir. Ajoutons à cela les étranges sentiments du voyage : laisser un endroit pour rentrer à la maison, fermer une parenthèse de l'existence, clôturer un moment, simplement. Alors des adieux comme ça, il faut y mettre les formes. La première précaution était de choisir la musique appropriée. Pour voler, il faut du post-rock. Je ne sais pas si c'est la conséquence de la pub Air France, mais l'avion, c'est prendre son temps avec la musique la plus aérienne possible.
La première idée, c'était le culte Lift Your Skinny Fist Like Antenna to Heaven de Godspeed You ! Black Emperor. Je le connais par cœur mais peu importe. Mais une autre pensée est venue se bousculer : The Earth is not a Cold Dead Place. C'est pas que je suis superstitieux, mais des explosions dans le ciel quand je suis en avion... Bref, finalement, je me suis souvenu d'un conseil avisé de Vianney il y a quelques années maintenant. Quelque chose du genre "Tu dois écouter WEG !". WEG, la feinte pour prononcer World's End Girlfriend, le projet de Katsuhiko Maeda (le plus facile à prononcer reste WEG...). Me voilà alors dans l'avion, peu après le décollage, le casque sur les oreilles, à voler sur la bande son de WEG. Un post-rock mâtiné d'IDM, de brisures, de ruptures de rythme qui s'amoncèlent sur les cordes lyriques et mélancoliques. Une construction savante qui s'étire peu à peu, qui prend de plus en plus de place, qui accompagne tellement bien ce défilé de nuages par le petit hublot. Qui accompagne tellement bien les souvenirs qu'on laisse là-bas, auxquels on ne veut pas penser, de peur de les consommer instantanément. On préfère les garder pour plus tard.
On repense aux adieux, à ceux qu'on ne reverra sûrement jamais, malgré les "si jamais tu veux venir, si t'es dans le coin, n'hésite pas". A ceux qu'on aimerait revoir, même s'ils sont au bout du monde, et à celle qu'on reverra sans aucun doute, même si elle est au bout du monde. S'affranchir des clichés ne sert à rien, ils sont tellement agréables.
Finalement, il faut retourner sur la terre ferme. Groggy par le vol, par la musique qui n'a pas cessé une seconde dans les oreilles, mais qu'on avait presque oublié tellement elle se fondait dans les pensées. Les pensées et la musique, la vision et la musique, tout ça ne faisait plus qu'un. Le ciel vu du bas, c'est quand même moins beau. La musique elle, est toujours aussi belle.
En 2007, World's End Girlfriend sortait Hurtbreak Wonderland chez Human Highway, et c'est beau comme des adieux.
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