Quel est l'intérêt d'écouter du bruit ? Pas du hardcore, du grind ou quelque chose de violent, non. Du bruit, pur. Il n'y a ni mélodie, ni construction. Juste un déluge de son numérique, des bandes triturées et abîmées. C'est complètement irrationnel. Ce n'est pas beau. Ce n'est pas prenant, ce n'est pas entraînant. C'est juste du bruit. Un truc pour se lobotomiser en bonnes et dues formes. Pourquoi s'infliger cela ?
Il y a un certain plaisir masochiste à s'infliger un disque de Merzbow, en plus de la performance. Masochiste dans le sens originel du terme. Un contrat entre Masami Akita et l'auditeur que l'on paraphe. Un "je m'engage à prendre une heure de tourbillon sonique dans les oreilles". La question, c'est de savoir d'où vient le plaisir.
Et je pense qu'on ne peut comprendre la puissance du bruit qu'à partir du moment où on en a fait. Faire du bruit procure un plaisir colossal. Une impression de puissance, de tenir le monde, d'avoir derrière son doigt une bombe atomique et la lâcher après avoir tergiversé sans vraiment y croire. C'est savoir qu'à partir du moment où son doigt effleurera une touche ou une corde, une puissance dantesque explosera dans la salle. Faire du bruit, c'est tenir le monde. C'est repousser les limites de la création tout en exaltant son ego. C'est romantique en un sens. Ça pousse à la recherche de nouveaux moyens de faire du bruit, un bruit différent, ou plus fort, ou plus insupportable. Qu'importe, tant que ça joue sur la dimension physique de la musique.
Masami Akita a bien compris ça. Par ce qu'il aime cette sensation d'omnipotence, de toute puissance, se sentir comme un Dieu qui lance un orage, il a fait du bruit. Il a sorti des centaines de disques de bruit. Il a participé à de nombreux autres projets. Avec Alec Empire, Boris, Sunn O))) et même Sonic Youth. Il a fait un film où l'on voit une femme s'ouvrir le ventre. Merzbow est donc un adepte de Leopold von Sacher-Masoch. Il transmet une souffrance physique, du bruit, qui devient plaisir, quand les termes du contrat sont connus. Un accord tacite pour une lobotomie.
Attention, Merzbow ne lance pas que du bruit sans arrêt, sans cohérence. Il met des variations, des passages plus calmes pour que les explosions soit encore plus fortes.
Ce disque est une partie de la série Hiyodori : 13 Japanese Birds, la partie 9 pour être exact. Il y a trois titre, mais ça dure une heure. "Accross the Earth" incarne le pouvoir du bruit. C'est sorti en 2009 sur Important Records, et ça fait mal aux oreilles. Mais on en redemande.
Je me suis pas penché sur l'ensemble de la discographie loin de là mais cet album et justement "Across the Earth" sont très abordables pour le néophyte du bruit.
RépondreSupprimerPar ailleurs je cite également Merzzow qui retient l'attention.
Ouais c'est un peu pour ça que j'ai mis celui-là. Parce que j'en ai d'autres impossibles à écouter en entier. Celui-là, ça passe.
RépondreSupprimerFaudrait que tu me files un lien pour Merzzow, je l'ai jamais trouvé.
J'avais trouvé un lien pour 50 albums... J'ai du en écouter 3 à tout casser.
RépondreSupprimerEnfin si mes souvenirs sont exacts cela provenait d'une compilation qui était sorti sur un label australien. Imaginer recevoir chez soi une boite de 50 albums avec en prime le poster et encore plein d'autres bonus. Le collector de l'underground m'voyez?
Surtout 50 albums de bruit. C'est pire que du field recordings quoi.
RépondreSupprimerImagine un blind test avec que du Merzbow...
Ah ah Merzbow :) Comment dire... J'apprécie la démarche, j'écoute ça comme j'irai à une expo d'art contemporain. Mais après, aucun risque d'en faire un de ses disques de l'année...
RépondreSupprimerJe pense pas que son but soit d'être dans les albums de l'année, en même temps. Enfin il est végétarien, faut se méfier.
RépondreSupprimerah la Merzbox, je le soupçonne d'avoir fait tant d'album et d'avoie pris ce nom de Merzbow pour pouvoir faire ce jeu de mots qq années plus tard
RépondreSupprimer