jeudi 20 janvier 2011

Humain, Trop Humain.

Il y a quelques mois, Mount Kimbie ouvrait de nouvelles perspectives, en traversant en diagonal la plaine qu'est le dubstep. Mount Kimbie, c'était la féérie r'n'b sur la sécheresse rythmique du dubstep, c'était l'austérité électronique qui s'habillait de chair. Mais la force de leur Crooks & Lovers était ailleurs. C'était son imperfection, ses faiblesses qui donnaient un pouvoir addictif assez intriguant. Des escrocs et des amoureux donc. Sachant pertinemment que leur amour pour les voix soul et rythm'n'blues seraient une arnaque pour les intransigeants, ils se lâchaient et le charme opérait. Pourtant, on a pu lire des reproches sur leur dilettantisme, et notamment live. Plutôt du côté de l'arnaqueur donc.

Et, malheureusement, il semble que le déluge rafraichissant Mount Kimbie n'était qu'un coup d'un soir. James Blake, proclamé génie comme l'a pu être un Nathan Fake, sort d'abord quelques EPs encourageants, dans la lignée de Crooks & Lovers, mais plus du côté "lover" vu le romantisme acidulé omniprésent. Un album donc, en 2011, pour le nouveau prodige, le sauveur du dubstep. Celui qui ferait avancer le genre, d'un pas de géant.
Et pourtant, retour à la case départ, quand Burial balançait ses samples dans des ambiances urbaines sombres et puissantes comme les secousses d'un métro. La force de Burial était dans ses ambiances, qui faisaient presque oublier à quel point ses voix vibrantes d'émotions pré-digérées étaient épuisantes. James Blake continue le trajet, et épure, encore et encore. Là où Scorn épurait au profit de l'ambiance, condensé de noirceur et austère comme le sourcil froncé de Lionel Jospin, James Blake, lui, s'appuie sur les voix.

Erreur ô combien fatale, de se tromper ainsi de chemin. A vouloir être trop humain, James Blake sombre dans le chamallow électronique. La base rythmique, celle qui fait se mouvoir en rythme les nuques, est inexistante, aucun décrochage jubilatoire, aucune surprise. Une ode à l'auto-tune, qui peut rappeler parfois les plus horribles heures de Bon Iver par Kanye West. On pourrait penser voir la lumière quand il reprend Feist - ou même le début du titre d'ouverture, presque prometteur ! -, mais décidément, jamais une boîte à rythme ne démarre vraiment. James Blake se noie entre deux eaux, comme si sa moitié lui manquait. Là où les rythmes devraient provoquer une tachycardie de bonheur suivie de chute de tension, là où les répétitions obsédantes devraient inventer des univers nouveaux, on se retrouve devant du vide, avec la désagréable impression d'écouter un maxi d'acapellas auto-tunés pour remix aléatoire.
La frontière entre l'escroc et l'amoureux ne tient qu'à un fil, et il semble bien que James Blake manque d'équilibre.

Le nouveau génie du dubstep sortira son album éponyme, James Blake donc, en février 2011, chez Hemlock Recordings, une erreur de jeunesse, espérons-le. Après tout, on est pas sérieux quand on a 22 ans.

5 commentaires:

  1. je vois où tu veux en venir, ton argument est clair, même si on est en désaccord :-)

    je m'aperçois au fil des écoutes que je raffole de la construction de cet album, déjà, l'entrelacs des genres est raté par presque tout le monde, et le sien me plait, et puis la voix, d'emblée je pensais à Burial, mais alors quand il révèle le chanteur formidable qu'il est ça m'a scié, et le chant étant mon instrument préféré... ^^

    RépondreSupprimer
  2. ouep, suis tombé sur un extrait de l'album, et le mot escroc est assez bien trouvé en effet ^^

    RépondreSupprimer
  3. Juste une petite précision : James Blake n'est pas la moitié de Mount Kimbie (Dominic Maker et Kai Campos). Il a juste bossé avec eux sur quelques tracks et ils font parfois des concerts ensemble.

    RépondreSupprimer
  4. Ah bah ça la fout mal alors. J'aurai dû plus vérifier. Enfin, le fond est toujours le même, juste la forme de la chronique qui n'a plus de sens du tout maintenant. :)

    RépondreSupprimer